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Vingt-quatre heures avec Nikita

Il y a dans les trains russes plusieurs classes de voyageurs. Celle qui nous est réservée comprend des couchettes pour quatre personnes. Nous serons 5. Je partage la mienne avec Sarah, une australo-américaine qui fait partie du groupe Intrepid, ainsi que Galina, une Russe d’un âge certain, ainsi que Vania, 4 ans, et sa maman.

Tous les voyageurs de mon groupe sont dans le même wagon mais nous sommes répartis dans des compartiments différents. 24 heures, c’est long. De quoi finir un roman, dormir, commencer un autre roman, se préparer un thé grâce au samovar du wagon, et surtout faire la connaissance de Nikita. D’abord de ses beaux yeux qui guignent par le fenêtre de son compartiment, à chaque fois que je passe dans le couloir.

Il a neuf ans, un t-shirt rouge marqué Russia et flanqué du drapeau de son pays, et surtout une grande curiosité et une drôle d’envie de rentrer en contact avec cette bizarre équipe anglophone.

Il tente un « hello », un « thank you » lorsque je le laisse passer. Il veut connaître toute l’étendue de mon vocabulaire russe et le compléter de mots nouveaux. Je vais chercher mon iPad et lui montre l’application qui me sert à enrichir mes connaissances. Nous jouons pendant quelques heures sous les yeux amusés de Galina. Les grands éclats de rires lorsque nous nous définissons, lui comme le maître et moi comme l’élève. Et je dois dire que j’étais très émue à Barnaoul lorsque qu’il m’a ouvert ses bras avec un grand до свиданияю

Au fond de mon sac un couteau suisse dont j’aurais pu me passer. Je voulais le lui offrir. Mais bien sûr, les choses ne sont jamais où elles doivent être et je n’ai pas pu lui laisser ce petit souvenir d’une rencontre improbable dans un train entre Karaganda et Barnaoul.

Un train pour Karaganda

Deux heures de train et nous arrivons à Karaganda. Les connaisseurs de Thiéfaine sont familiers du nom. Karlag…. Le Goulag de Karaganda. Un camp immense, de la taille de la France, au beau milieu du Kazakhstan. Et un ancien bâtiment du KGB transformé en musée, en mémoire des victimes.

C’est moins prenant, moins angoissant, moins étouffant qu’une visite d’Auschwitz, car les pièces les plus angoissantes sont des reconstitutions. Mais on n’en sort pas totalement indemne.

C’est depuis cette ancienne capitale minière que nous prenons le plus long train de ma vie – eh oui, le Transsibérien est encore sur ma liste de choses à faire. Nous passerons 24 heures dans d’anciens wagons russes pour quitter le Kazakhstan et arriver à Barnaoul.

Je dis adieu à Nazira, jamais deux sans trois. Peut-être que la prochaine fois ce sera sur mes terres.

Cinq jours avec Nazira

5 jours avec Nazira

Au moment de prendre mon billet pour le Kazakhstan, sa capitale se nommait Astana. Elle a été renommée depuis en Nur-Sultan, prénom de Nazarbaiev, celui qui a présidé le pays depuis l’éclatement de l’empire soviétique.

Y a-t-il eu des tractations ? Tu démissionnes enfin sans bruit et on renomme la capitale à ton nom ? Nul ne le sait.

J’arrive au petit matin, un chauffeur m’emmène à l’hôtel, je négocie un « early check in ». Il me faut quelques heures de repos avant « le grand rendez-vous de 18 heures ».

NurSultan n’est pas faite pour les piétons. Bien sûr, il y a des trottoirs, des feux rouges qui permettent de traverses les grandes artères, mais elle est immense. Lorsque, à la réception de l’hôtel, je demande qu’on m’indique la direction et le temps pour le plus proche centre commercial, on me dit 30 minutes (ok, ça va, je gère) « by taxi ». Oh…. Là c’est autre chose. Bon. Je ne visiterai pas Astana aujourd’hui et me contente de quelques pas non loin de l’hôtel, le temps de trouver un petit commerce et vérifier que le russe est toujours la langue dominante.

Le soir, rencontre du groupe, de notre guide pour les trois semaines à venir, elle s’appelle Yulia, est russe, drôle, et me réserve une jolie surprise.

A la quasi unanimité le groupe décide de ne rien savoir de l’itinéraire et du programme. Nous serons informés au jour le jour. On est là pour l’aventure, non ?

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Jour 10 – Mardi 31 octobre – Retour au bercail

Si le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, j’en réclame une part. Il est cinq heures, l’aéroport grouille déjà. La serveuse du bar à café dort debout. Turkish Airlines fait bien les choses et le vol jusqu’à Istanbul se déroule sans accroc.

Lee** est dans le même avion. Ça tombe bien, c’est le voyageur dont je me sens le plus proche. Photographe amateur, ses clichés sont meilleurs que les miens (grr) et je vais le suivre attentivement sur Facebook !

C’est drôle, souvent en l’observant, je me vois. On choisit d’instinct plus ou moins les mêmes angles d’approche, mais il est plus rapide, plus décidé. Comme moi, il tend à doubler les clichés (boitier pro + image faite à l’iPhone) mais ses images sont meilleures. Il doit être juste un peu plus exigeant au niveau du cadrage et de la composition.

Nous avons comparé nos cartes de voyage. Il a déjà visité bien plus de 100 pays alors qu’il est plus jeune que moi de quelques années. Bon… il n’a pas encore mis les pieds ni en Finlande ni en Corée du Nord (hé hé… avec celui-là j’épate beaucoup de monde). C’est un des voyageurs les plus impressionnants que j’ai croisés à ce jour. Il a mis la Géorgie et l’Azerbaïdjan sur ma liste des priorités (d’un autre côté, quel pays n’y figure pas encore ?).

Au fil des voyages, je me retrouve à suivre via les réseaux sociaux, des personnes dont l’envie de voir le monde est semblable à la mienne…  Il est drôle aussi de « copier » leurs clichés, ou même de voir qu’ils « copient » les miens à quelques mois d’écart – Je me souviens d’une plante que j’ai vue en pleine forme en juillet et qui s’est retrouvée fanée sur l’image de Catherine** en octobre, à Kotor.

Que le temps est long lorsqu’on attend dans un aéroport. Une fois les Duty Free dévalisés (miam, des Loukoums) et le Starbucks visité, que faire ? Attraper des Pokémons ? Fait. Et nom d’un petit bonhomme, que c’est grouillant, Atatürk le lundi, avec ou sans Bécaud.

Oui, j’envie ceux qui peuvent se réfugier dans un Lounge où tout n’est qu’ordre, beauté, luxe, calme, volupté, wifi, prises électriques, bouteilles d’eau sans avoir à faire la queue pendant vingt minutes. Il serait faux de dire que je donnerais cher pour y avoir accès… J’aimerais juste une fois faire cette expérience.

Petit Airbus qui a connu des jours meilleurs pour rentrer à Zürich. Espoir d’attraper le train de 18, celui qui me ramènera au bercail sans devoir changer à Berne.

** Prénoms authentiques

Jour 9 – Lundi 30 octobre – Jours tranquilles à Almaty

C’est le jour où je mets mes baskets et je me perds dans la ville.

Longtemps j’ai pensé n’avoir aucun sens de l’orientation. Ce n’est qu’en commençant à voyager que je me suis aperçue que j’avais – à ma petite mesure – le don des pigeons voyageurs. Je peux partir au hasard, mais j’arrive toujours à retrouver facilement mon point de départ.

Dans le cas d’Almaty, ce n’est pas très difficile, le terrain est plat et les routes sont régulières, formant un quadrillage dans lequel on se repère aisément.

Le centre commercial Tsum est recommandé par les voyageurs Tripadvisor pour des achats souvenirs. C’est au troisième étage que vous trouverez des objets traditionnels, petits chameaux, minuscules yourtes en laine ou en cuir, jeux d’échecs, foulards, instruments de musique, bijoux etc. Les boutiques se ressemblent un peu. Parfois vous pourrez payer avec une carte de crédit, mais on préférera toujours du cash (même en rouble, euro ou dollar) et les commerçants sont prêts à consentir à de jolis rabais lors de paiements en liquide.

Le « Geen Market » ou « Green Bazar » vaut le détour, mais il est malheureusement fermé le lundi.

C’est un jour plus détendu que les autres et j’apprécie particulièrement ma solitude retrouvée pour la journée.

Dernier repas en groupe dans un restaurant typiquement Kazakh avec décor et nourriture en rapport. Une petite salle dont le plafond est décoré comme celui d’une yourte nous est réservée.

Jour 8 – Dimanche 29 – Almaty

Après une semaine à parcourir le sud du Kazakhstan, il fait bon de retrouver Almaty, ses rues grouillantes, sa pollution atmosphérique. Blague à part, dans beaucoup de foyers, on se chauffe encore au bois ou au charbon, ce qui voile là ville de fumée, dès que les températures baissent.

En parlant de températures, alors que nous avons connu des chiffres négatifs du côté d’Aralsk et de Baïkonour, Almaty nous réchauffe avec des 18°.

La vue sur la ville et sa pollution est particulièrement impressionnante depuis Medeo et Kok-Tobe.

La deuxième est une station de sport d’hiver comprenant principalement un anneau de patinage de vitesse construit pour l’entraînement des athlètes de toute l’URSS. Bien des records mondiaux y ont été battus. Aujourd’hui il est ouvert au public. Dès bus et des télécabines partent directement d’Almaty pour s’y rendre et c’est un lieu d’excursion apprécié des citadins.

Un peu plus bas, Kok-Tobe compte un petit zoo, quelques attractions foraines, deux ou trois restaurants, une promenade agréable pour les familles, et… une statue des Beatles financée par des fans locaux.

Nous parcourons également le centre-ville, ces principaux monuments, le musée des instruments de musique locaux dans lequel je serais bien restée quelques heures, la cathédrale orthodoxe faite en bois, pour survivre aux tremblements de terre nombreux dans la région, le monument aux victimes de la seconde guerre mondiale, principalement des soldats tombés pour la défense de Moscou. Les traces de l’architecture typique des pays communistes sont nombreuses.

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Le musée archéologique vaut le détour. Des yourtes, habits, bijoux, outils du quotidien vous donneront un aperçu de la vie nomade qui était la norme jusqu’à l’avènement du communisme. Demandez à voir également la pièce dédiée à l’or. Celle-ci est fermée à clef et gardée car les objets qui s’y trouvent sont particulièrement précieux. Elle renferme des bijoux, armes ou autres ornements découverts dans la région.

Repas dans un restaurant russe, décor d’origine, nourriture impeccable, musique authentique qui change agréablement de la soupe (musicale) internationale servie un peu partout ailleurs. Le russe est une langue courante au Kazakhstan et on peut vivre à Almaty sans parler le kazakh.

Un petit mot de notre guide Nazira**. Elle a réussi l’exploit de garder plus ou moins soudé notre petit groupe aux intérêts et caractères très très très différents voire divergents! (Vous ai-je parlé de Maggie* ?) Russe d’origine, elle vit à Almaty depuis une trentaine d’années. Elle travaille pour Intrepid Travel mais également d’autres agences de voyage et s’occupe aussi bien de tours du pays que de visite de la ville – en anglais. Si vous voyagez au Kazakhstan avec un groupe, je vous souhaite de tomber sur une personne aussi compétente, tant au niveau humain que purement touristique.

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*Prénom d’emprunt

** Prénom authentique

Jour 6 – Vendredi 27 – On a slow train to Turkestan

Sept heures de train pour se rendre à Turkestan. On ne rentre pas dans une salle d’attente Kazakhe comme dans un moulin ! Il faut avoir un billet. On ne choisit pas son wagon comme on veut dans un train Kazakhe, il faut suivre ce qui est écrit sur son billet. On ne s’assied pas où on le souhaite dans un train Kazakhe, c’est comme dans un avion. Il faut même pouvoir montrer son passeport à un des nombreux employés qui contrôlent le comportement des voyageurs. D’ailleurs, on ne peut pas boire d’alcool dans les trains kazakhes – sauf dans le wagons restaurant où je me réfugie avec deux compagnons pour échapper à Maggie*.

Dieu merci, enfin un peu de temps pour mettre à jour le blog !

Arrivée le soir à Turkestan, 170000 habitants, et ville sainte. On dit que trois visites ici valent une visite à la Mecque. Juste le temps de faire un tour dans le centre historique à la nuit tombée pour admirer de loin le Mausolée d’Ahmed Yasavi sous un croissant de lune.

Mausolée

Mausolée

Retour à l’hôtel Khanaka, 4 étoiles, chambres spacieuses et confortables, luxe, calme et volupté et Wifi…. Qu’on ne capte pas depuis ma chambre.

*Prénom modifié.

Jour 5 – Jeudi 26 octobre – Baïkonour et Bowie.

Intrepid Travel programme ce tour en fonction des dates de lancement de fusées au Cosmodrome de Baïkonour, mais prévient que les annulations et reports sont monnaie courante.

Bunker inside

Il y a un mois, j’ai reçu la nouvelle que le lancement prévu le 26 octobre était repoussé à décembre. J’avais donc revu mes attentes à la baisse.

MacBook d’occasion

Baïkonour et son Cosmodrome sont deux entités distinctes géographiquement, distantes de quelques kilomètres. Les deux sont des territoires spéciaux, loués par la Russie au Kazakhstan jusqu’en 2050. On n’y pénètre qu’avec un permis, en montrant patte blanche, lors d’un tour organisé.

Vieux iMacs

L’activité économique de la ville tourne autour du Cosmodrome. Ceux qui n’y travaillent pas fournissent des services à ceux qui y travaillent. Une ligne de chemin de fer est exclusivement réservée aux trajets entre les deux et transporte quotidiennement des milliers de scientifiques, ingénieurs ou petites mains. Le nombre exact est considéré comme confidentiel.

Avant de quitter l’hôtel, nous signons un papier qui nous fait accepter un certain nombre de règles, dont la principale consiste à ne pas filmer ou photographier les endroits où ceci ne nous serait pas expressément permis. Galina, responsable de la notre sécurité ne nous quittera pas de la journée. Elle nous remet des badges à nos noms.

OK ! Go !

Le premier arrêt est pour le pas de lancement 1, celui utilisé lors du premier vol habité par un humain dans l’espace. Mettre ses pieds dans ceux de Gagarine. Un petit pas pour l’homme, un grand…. Euh non, ça c’est une autre histoire. Ce pas de lancement est vide de toute fusée pour l’instant, mais il est toujours utilisé. « Notre » lancement aurait justement dû s’y dérouler. Oh well….

Les bras qui maintiennent la fusée, les bras « de service » tout est mécanique et semblable aux systèmes déjà en place en 1957 lors des premiers lancements sur place. Oh, ai-je dit qu’il ne s’est déroulé que dix-sept mois entre le premier coup de pioche et le premier lancement ?

La guide locale sera suivie de plusieurs autres dans les différents lieux visités du cosmodrome. Uniquement des femmes. Je n’ai pas réussi à savoir si elles étaient des scientifiques qui guidaient parfois les touristes, ou si elles n’étaient « que » guides. Dans tous les cas, leurs connaissances techniques m’ont impressionné et n’ont pas manqué d’impressionner un de mes compagnons de voyages dont la culture spatiale semblait très étendue.

Il y a peu de touristes. Nous étions les seuls ce jour-là dans tout le cosmodrome. Le coût de la visite est, m’a-t-on dit, prohibitif pour les populations locales. Je ne sais pas exactement à combien il se monte vu que dans mon cas il fait partie d’un tout.

Nous avons le droit de photographier le pas de lancement, depuis un endroit bien précis, mais pas le train qui amène la fusée à un pas de sénateur depuis la grande halle d’assemblage jusque-là. Je vous jure que c’était difficile de cadrer sans qu’on voit une partie de ce train !

Pas de tire numéro 1

Départ ensuite pour un ancien centre de contrôle du projet Buran, la navette spatiale soviétique. Pour cela, passage obligé par les sous-sols hyper sécurisés, situés derrière d’épaisses portes qui rappelant celles des abris anti-atomiques qui garnissent les fondations des villas suisses.

Les ordinateurs semblent dater de bien plus de trente ans. Tout est en état de marche, mais bien sûr, inutilisé, remplacé par des technologies modernes.

 

Visite ensuite au musée du Cosmodrome où nous voyons des pièces historiques. Modèles, reconstitutions, voire même des originaux, d’ordinateurs, scaphandres, nourriture spatiale, « siège » de décollage, capsules, etc…

Capsule (de Nescafé ?)

Position foetale pour le décollage.

Nous dévalisons la minuscule boutique du musée. Il y a quelques gadgets, t-shirts, magnets. Hélas pas ce que souhaite Maggie*. Je vais acheter une barre « Mars » à la cafétéria. Dans ma tête ne trotte plus « Space Oddity » mais « Life on Mars ».

Un homme dans l’espace !

Le nez de Buran

À l’extérieur du musée, un modèle grandeur nature de Buran, la navette spatiale soviétique. La seule qui ait volé a été détruite il y a quelques années, le toit de l’entrepôt dans lequel elle coulait une retraite heureuse s’étant effondré. Même si ce n’est qu’un modèle, le fait de pouvoir y renter, de grimper dans le poste de pilotage, a quelque chose d’émouvant.

Et, cerise sur le gâteau, visite de la maison où Gagarine et son remplaçant ont passé leurs dernières semaines avant le lancement.

D’ailleurs, son remplaçant, connaissez-vous son nom ?

Luxe calme et volupté pour une dernière nuit sur terre.

Titov. Le processus de sélection était long et difficile pour arriver à ces deux derniers noms. Ce qui a fait que Gagarine a été choisi plutôt que son camarade est source de spéculations. Je connais plusieurs théories, et depuis aujourd’hui, une de plus. Gagarine, à chaque fois qu’il pénétrait dans la fusée, ôtait ses chaussures, comme on le fait dans la région lorsqu’on arrive dans une maison. C’est ce qui aurait emporté la décision.

Salle de contrôle

Ses beaux yeux clairs ? Son extraction ouvrière ? Non, c’est son respect pour la fusée qui lui a valu sa place.

Maison de Gagarine et Titov

On s’attend que pour une dernière nuit sur terre, alors que les chances de revenir vivant sont inconnues, on puisse bénéficier d’un certain luxe. Ce n’est pas le cas. La maison est petite, très simple et chichement meublée. Elle me rappelle, tiens, l’hôtel Tsentralnaya.

Youri forever

Retour en ville après les check-points et passage rapide au musée Baïkonour. Pour Edward, notre jeune guide local, c’est une première. On se sent très nerveux et pas encore très bien rôdé. Malgré tout, il fait son travail. Je dois avouer qu’après une journée à courir dans le Cosmodrome, mon attention n’est plus tout à fait là. Il nous accompagne ensuite en mini bus pour un tour des principaux monuments de la ville. C’est là que Maggie* fait preuve de toute sa subtilité en se plaignant sans arrêt de ne pas entendre Edward, de ne pas le comprendre, etc. Lors d’un arrêt près de la statue de Gagarine, alors qu’elle s’était éloignée pour prendre des photos, je suis allée rassurer le jeune guide dont le visage commençait à se décomposer.

In the streets of Baïkonur

Nuit à l’hôtel Tsentralnaya qui n’a pas eu la bonne idée d’installer le wifi pendant notre visite au Cosmodrome.

Goodbye Lenin

*Prénom modifié.

Kazakhstan – Jour 1 – 22 octobre 2017 – Le trajet

Alors que Zurich et son arrogance (souvenez-vous de « Downtown Switzerland » et « Unique Airport) tendent à m’agacer, je dois bien avouer que je préfère décoller de Kloten que de Cointrin. Le seul avantage de ce dernier, c’est qu’Etienne parfois guide mon avion.

A ZHR, je finis par me sentir un peu comme chez moi. Tout juste si je ne reconnais pas les douaniers ou les agents de sécurité d’une fois à l’autre.

Pour Almaty, le plus simple c’est de passer par Istanbul. C’est donc avec Turkish Airlines que je vole pour la première fois. J’ai lu que plusieurs années de suite, cette compagnie aérienne s’est très bien classée dans les rankings. Vaut-elle sa réputation ? Les avions sont propres, la nourriture est étonnamment bonne, mais, comme partout d’ailleurs, on a vraiment l’impression de voyager dans une boite de conserve. Contrairement à mon habitude, j’avais choisi des sièges hublot, espérant vaguement pouvoir m’endormir, la tête contre la paroi de l’avion. Et bien je crois que je ferai le retour côté couloir. C’est oppressant de penser qu’on ne peut pas se lever, faire quelques pas, sans déranger les voisins qui, eux, connaissent le numéro de portable de Morphée.

Jusqu’à Istanbul, j’étais victime d’un manspreader…. Mais bon, vue la taille de ses jambes, il aurait difficilement pu les ranger ailleurs qu’en empiétant sur l’espace de ses voisines. Quelle torture ça doit être de voyager en Economy lorsqu’on est grand !

Sinon, oui, Turkish est une bonne compagnie – so far – si on excepte le fait que j’ai beaucoup de mal à comprendre l’anglais parlé avec l’accent turc.

Et pas seulement l’anglais des hôtesses de l’air ! À l’aéroport d’Istanbul, avant d’embarquer pour Almaty, on passe un nouveau contrôle des bagages. En voyant mon MacBook, l’agent me dit

– Sitchon

– ??

– Sitchon !!

– ???

– Sitchon the laptop !

– Oh… okay… I switch it on.

Après une nuit de non sommeil passée à regarder défiler les noms des villes survolées, j’arrive à l’hôtel. Il est 10 heures du matin. Je rêve d’une douche, d’une sieste, de prendre un coca frais dans le mini bar.

– No you cannot have the room before 12

– Oh… when will the room be ready ?

– It is ready but you cannot have it.

– Why ?

– You have to pay for it.

– Oh…. How much ?

– Well… I don’t know.

Elle m’a donnée la clef, mais pas la permission d’aller dans la chambre. Oh well… je me retrouve à somnoler devant un café au lait avec deux autres voyageurs dans la même situation. Et le wifi qui ne veut pas marcher.

A 12h30 je suis installée, douchée, je me prépare à ma sieste quand on toque à ma porte.

– André ? But… you’re not André !

– (finement observé)

A 14h30 je suis au milieu d’un rêve quand on rentre carrément dans ma chambre.

– Oui ??

La porte qui se referme et des pas précipités dans le couloir.

Rassurant !

Réveillée pour réveillée, je me décide d’aller faire le tour du quartier. Non sans avoir cherché à mettre mon ordinateur et ma tablette à l’abri dans le coffre-fort qui, bien sûr, ne fonctionne pas.

L’automne est aussi beau à Almaty qu’ailleurs. C’est dimanche après-midi et les familles se promènent. Je pousse jusqu’à « Central Park » puis au « Green Bazar ». Par deux fois on m’aborde. Le Kazakhstan compte deux langues officielles, le russe et le kazakh. Ce n’était pas du russe.

Ce soir je rencontre mes compagnons de voyage. Je serai dans un petit groupe. Un des points forts de ce séjour est la visite du Cosmodrome de Baïkonour, or, ça ne se visite pas en dehors de tours organisés. Deux Anglais, deux Australiennes et moi et moi et moi. Notre guide est une Russe qui vit au Kazakhstan depuis le démantèlement de l’URSS.

Tout va bien  – sauf le Wifi qui ne fonctionne toujours pas !

Repas avec le groupe dans un restaurant géorgien des environs. Je sais maintenant que lorsque je visiterai la Georgie, ça ne sera plus seulement parce que l’alphabet est très beau ou que la musique traditionnelle y est superbe, mais aussi parce que… miam.

21 octobre 2017 – Le mur de la cuisine

Lorsque j’étais enfant, le nez collé à la carte du monde, je m’extasiais sur la taille de l’URSS. Mon père me parlait de pays disparus, la Lettonie, l’Estonie, la Lituanie, égarés à jamais dans cette immense masse verte.

Bien plus tard, un prof d’histoire-géo, toujours en parlant de l’URSS nous détaillait ces pays en ‘stan’ « Je vous donne les noms, mais vous pouvez les oublier. Souvenez-vous juste qu’il y en avait beaucoup et qu’ils étaient situés plus ou moins au sud. Et moi, je m’étais obstinée à les noter scrupuleusement, le Tadjikistan, l’Ouzbékistan, le Turkménistan, le Kirghizistan, Le Kazakhstan,… Comme si le fait de les graver dans ma mémoire leur permettait d’exister encore un petit peu.

Bien sûr, arrive Gorbatchev et sa Glasnost. Le mur tombe et, petit à petit, ces pièces de puzzle retrouvent une existence sur la nouvelle grande carte du monde du mur de la cuisine.

Non, ce n’est de loin pas mon premier voyage à l’Est, en revanche c’est mon premier « stan » que je me réjouis de découvrir dès demain.

Lorsqu’on demande à Wikipédia de classer les pays par taille, on trouve, en bonne place le Kazakhstan. Et lorsqu’on voit « Le Souffle », splendide long-métrage qui se déroule dans les plaines de l’Asie centrale, on ne peut que vouloir contempler cette autre sorte d’infini de nos propres yeux.

Voilà. J’espère que ça répond à cette question entendue des dizaines de fois ces dernières semaines : « Mais pourquoi diable le Kazakhstan ? »