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1741

15 au 17 août 2017

Ilulissat – Groenland.

L’aéroport international de Reykjavik est minuscule. L’avion qui embarque une trentaine de passagers vers le Groenland également. Seule l’hôtesse est immense.

Après un peu moins de trois heures de vol au dessus de la mer, puis des glaciers et montagnes, nous atterrissons à Ilulissat.

L’aéroport international d’Ilulissat est également minuscule.

Troisième ville du Groenland avec près de 5000 habitants, elle se situe sur la côte Ouest, au centre de la baie de Disko. Elle a été fondée en 1741 par Jakob Severin, d’où son nom original de Jakobshaven.

Après les villages soignés, les lieux touristiques immaculés vus en Islande (le moindre mégot au sol était tellement rare qu’il incitait à se baisser pour le ramasser), c’est le retour à la normale. L’environnement n’est pas (encore) une préoccupation de tous les instants. C’est plutôt la survie dans ce bout de terre et de roc bien au delà du cercle polaire.

Ilulissat n’est pas un village de carte postale. Il n’a pas une vocation touristique. Alors que le réseau routier ne fait que quelques kilomètres, il y a beaucoup de circulation, des véhicules en mauvais état. Comme tout vient par la mer ou par avion, c’est difficile de réparer, alors soit on ne répare pas, soit on fait une réparation de bout de ficelles. Le port abrite des bateaux de pêche ainsi que ceux destinés aux excursions touristiques, ou ceux qui font la liaison entre les diverses localités de la côte. On va de l’une à l’autre en bateau ou en avion. L’hélicoptère n’est employé qu’en cas d’urgence, ou comme moyen de découverte pour les plus fortunés parmi les touristes. On y vit un peu des visiteurs, beaucoup de la pêche. Une usine récolte les crevettes et les transforme avant de les envoyer dans le monde entier.

Le 15, tour à pied. On repère l’ancienne église, le musée d’histoire, celui d’art, les quelques commerces et boutiques d’artisanat.

Le 16, départ matinal à bord d’un bateau comportant une quarantaine de passagers pour le glacier Eqi.

Eqi

Trois heures de mer pour se retrouver à distance respectueuse de ce mur de glace. Winter is coming.

Et là on coupe le moteur, on observe, on écoute le bruit du silence, on se laisse surprendre par la glace qui se détache à intervalles réguliers. Une heure à admirer un des derniers géants du monde.

Respire !

On dépose les quelques courageux qui passeront une nuit ou deux au « Glacier Lodge Eqi ». Je parle de courageux, mais les cabanes semblent toutes très bien équipées. Nous embarquons au passage ceux qui en reviennent. C’est peut-être une aventure à tenter si vous voulez découvrir cette partie-là du Groenland.

Retour le soir à Ilulissat, à temps pour voir que deux bateaux de croisière stationnent près de l’entrée du port. Ils sont beaucoup trop grands pour y accéder et des navettes font… et bien, la navette pour emmener les visiteurs, monopolisant le seul ponton « à touristes ».

Le 17, réveil et lecture d’un article du Temps décrivant les feux de broussailles qui s’attaquent au Groenland, suite à un mois de juillet beaucoup trop sec. C’est le moment de bénir la petite pluie qui tombe depuis quelques heures. C’est le moment également de visiter les deux musées de la ville. Etonnement à la troisième fois qu’un touriste s’adresse à moi en allemand. Je réponds dans mon allemande de cuisine, puis en anglais, un peu interloquée. Que se passe-t-il ? Mes cheveux auraient-ils blondi ? Est-ce que je chantonnais « Deutschland über alles » ou « 99 Luftballons » sans m’en apercevoir ? À la fin de la visite du musée d’Art, le conservateur vient me parler (en anglais) et me demande si je suis aussi de ceux du bateau de croisière. Non. C’est là que j’apprends que les deux navires vus près du port sont affrétés par des compagnies allemandes pour leurs nationaux et qu’un bon millier de personnes débarquent chaque matin, puis rentrent à midi pour manger (croisière « all inclusive » oblige) et reviennent peut-être l’après-midi.

J’étais loin de m’imaginer que ce phénomène observé plus tôt cet été à Kotor puis Dubrovnik atteignait également les cotes Groenlandaises. Je cite l’homme de mémoire« They walk around the town, see the museum, and when they realise that they have to pay something, they turn around. They don’t spend a thing here, maybe just a postcard. I’m not sure this kind of tourism is good for us ».

Départ ensuite d’une douzaine de personnes pour quatre heures d’observation des baleines au milieu des icebergs. A nouveau le ponton complètement envahi par les navettes « de croisière », nous attendons notre tour pour enfin embarquer. Sur les douze passagers, huit proviennent des navires allemands. Comme quoi ils nourrissent tout de même un peu l’économie locale.

Temps de chien (groenlandais) comme dit plus haut. La cabine est assez grande pour nous abriter tous, les thermos sont pleins de café ou thé, les plus téméraires, ceux qui ont des doudounes de luxe, des gants en peau de radiateur et des appareils photo entièrement tropicalisés restent au dehors le zoom 500-1000 à l’affut.

En parlant de bien s’habiller, j’avais repéré une doudoune qui me semblait tellement chaude et confortable sur le dos d’une touriste. J’ai soigneusement mémorisé la marque et le modèle dans l’idée de m’en offrir une. Un petit tour sur google m’apprend qu’elle coûte $ 995.- De quoi me faire recracher mon chocolat chaud ! Deux doudounes et je remplace mon Olympus qui décidément se montre peu coopératif depuis le début du voyage.

Au bout d’une heure, nous ralentissons au milieu d’un cirque d’icebergs. Nous voyons au loin d’autres embarcations, le moteur se coupe et on observe. Et c’est à celui qui repérera le premier un dos qui émerge. A celle qui entendra la première le fameux jet d’eau.

Et le ballet commence. Souvent elles longent la paroi des icebergs, parfois se promènent à deux. Après être restées à la surface pendant plusieurs secondes, elles plongent en profondeur, nous montrant leur spectaculaire nageoire caudale. Certaines encore stationnent, leur dos en évidence, pendant de longues minutes. Peut-être qu’elles dorment nous dit la guide.

Retour au port. En chemin vers l’hôtel, j’observe encore une fois les chiens d’Ilulissat. Ils sont répartis autour du village, en groupes. Chacun est enchaîné à sa niche. Les chiens adultes n’ont pas le droit de se promener librement. Il ne s’agit pas d’animaux de compagnie, mais de chiens de traîneaux. Ils ne sont pas dressés pour être aimables, mais pour le travail. On demande aux visiteurs de ne pas s’en approcher, car, même si les incidents sont rarissimes, lorsqu’un chien mord un touriste, il doit être abattu, ce qui n’est drôle pour personne, surtout pas pour le chien. On les observe à bonne distance. Ils sont beaux, forts, curieux. Il est si tentant de s’en approcher.

Les autres races ne sont pas admises sur l’île. Même à l’intérieur de celle-ci, j’ai lu qu’un chien du Groenland qui descend au dessous du cercle polaire n’aura jamais le droit de revenir au dessus.

Et sinon, on y parle le groenlandais, le danois, et volontiers l’anglais. Les quelques affiches dans la langue locale me laissent perplexe. Tant de voyelles et consonnes doublées lui donnent un aspect étrange. La lettre C n’existe pas en groenlandais. D’où cet étrange « abédédaire ». Dans le musée, nous voyons la liste de tous les pasteurs, les facteurs et les médecins de la ville depuis sa fondation. On y trouve un nombre important de « Christian ». Ça a dû rendre aussi perplexe les locaux que moi devant le þ islandais. Les supermarchés ne nous dépaysent pas, moins qu’en Islande, on y trouve les mêmes pampers, soupes knorr, kellogs qu’un peu partout en occident. Le rayon animaux nous apprend qu’il doit y avoir des chats, même si je n’en ai pas vu se promener en liberté, et pas mal de souris, vues les trappes en vente.

Soyons claire : Le Groenland n’est pas pour toutes les bourses. D’abord, il faut y aller. Les trajets depuis Reykjavik sont chers, cela s’explique sans doute par le manque de concurrence ainsi que la taille réduite des avions.

Ensuite, sur place, le coût de la vie dans les supermarchés est raisonnable, de même que la nourriture dans les quelques restaurants du coin. Vous y trouverez plus facilement une petite restauration qui m’avait manquée dans les coins reculés de l’Islande. En revanche, les activités d’exploration de l’île sont très chères. Bien sûr, les vols en hélicoptère, séjours dans les campements, virées sur les glaciers ont un coût justifié, mais, même pour un touriste suisse, ça fait mal à la MasterCard.

 

Et sinon, vous n’avez pas besoin de vous offrir une doudoune à $ 1000. Oui, la sienne avait l’air terriblement cozy, mais ma columbia avec les gants, bonnets, chaussettes et guêtres heat holders par dessus mon jean et mon t-shirt suffisaient largement pour les deux sorties en mer.

On est en été !