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17 octobre 2018- mercredi – déjeuner sur l’herbe


Il paraît que pendant la nuit les chiens ont aboyé sur la place devant l’hôtel. Je n’ai rien entendu.

Réveil dans une Thimphu qui ne montre que les stores baissés de ses devantures. Tout est fermé pour les élections. Nous remontons la vallée sur quelques kilomètres, direction un temple ! Une quarantaine de minutes de marche en grimpée et nous voilà arrivés. Belle vue sur la vallée, on croise nos premiers touristes, en majorité anglophones, et on souffre de l’altitude. On devrait avaler ces quelques kilomètres facilement, mais le corps nous rappelle que l’air est plus rare, et que les ans se font plus nombreux. J’imagine que cette petite balade permet à Tashi de se faire une bonne idée de notre (manque de) condition physique ! Là-haut, des moines méditent pendant trois ans, trois mois et trois jours. 

À l’entrée, un guichet vide et un livre de visite que notre guide remplit pour nous. Ce guichet servira peut-être dans un futur proche à encaisser des droits d’entrée pour les touristes indiens.

Les ressortissants de certains pays du sud-est asiatique ne payent en effet pas le fameux visa hors de prix. Or, ils constituent la moitié des touristes entrant au Bhoutan. Il est donc question de leur demander une contribution au maintien du patrimoine local, contribution qui, pour nous, est comprise dans le prix du visa.

Nous ne pouvons pas tout visiter. Il semble que quelques indélicats se sont autorisé à photographier des endroits « interdits » et ont posté les images sur les réseaux sociaux. Résultat des courses : punition collective.

Le repas est un pique-nique sur l’herbe, mais quel pique-nique ! Pendant notre visite du Temple, Sonam est allé chercher le repas. Riz, poulet, piments, autres légumes, fruits, thé, café, sortent d’un panier qu’on croirait sans fond. Assis sur l’herbe, nous sommes rapidement rejoints par une dizaine de chiens que j’hésite à appeler sauvages. 

Takins

Ils ne sont à personne, donc ils sont à tout le monde. Ces chiens ne sont pas agressifs, ils semblent bien soignés, bien nourris par la communauté, mais un peu craintifs. Ils attendent la fin du repas pour se précipiter sur les restes. Tashi veille à ce que le plus maigre puisse avoir une bonne part du butin. Une fois que nos plats et nos assiettes sont vides, ils s’installent autour d’un autre groupe.

Cette attention portée aux animaux, à tous les animaux, sera constante pendant tout le voyage.

Nous quittons le bord de la rivière et croisons un groupe de touristes indiens. Tashi nous apprend que pour eux, rien que le fait de se retrouver au bord d’un cours d’eau rapide et propre est une source d’émerveillement et qu’une bonne partie d’entre eux préféreront passer la journée au bord de l’eau plutôt que de grimper jusqu’au Temple. 

C’est le début de l’après-midi quand nous reprenons le chemin de Thimphu. 

Un des personnages historiques les plus connus du Bhoutan est le Drukpa Kunley, le fou divin. Nous reviendrons sur sa vie, ses œuvres, mais une des plus remarquable est la création du Takin, à partie du cadavre d’une vache et d’une chèvre. 

Un parc zoologique sur les hauteurs de la capitale en abrite quelques dizaines. Peureux, ils ne s’approchent pas des visiteurs.

Surmontant la capitale, un des plus grands Bouddhas du monde, de bronze et d’or. Construite pour le 60èmeanniversaire du quatrième roi, elle a été financée par des fonds de Chine et de Singapour. Dans la douceur de l’après-midi, de nombreux Bhoutanais se promènent à l’ombre de la statue.

Retour en ville pour la visite du Chorten de Thimphu. Un Chorten est un monument religieux qu’on connaît aussi sous le nom de Stupa. Celui-ci a été construit en 1974 en l’honneur du troisième roi, Druk Gyalpo, Jigme Dorji Wangchuck (1928 – 1972). Contrairement à la plupart des Stupas, il ne contient pas de restes humains. Des Bhoutanais de tous âges en font le tour, dans le sens des aiguilles d’une montre, en animant les moulins à prière. C’est également un lieu de socialisation. Peut-être commentent-ils les résultats des élections du jour ?

Des cables semblent ancrer le monument au sol, résultat d’un rêve de l’architecte qui avait vu son œuvre s’envoler. 

Retour à l’hôtel et à son « Swiss Restaurant ». Demain nous quitterons la capitale.

Katmandou – 14 et 15 octobre 2018 – Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

Encore un voyage préparé avec amour (j’espère) et grand soin par Marlène, chez Globetrotter à Fribourg.

En route vers le Bhoutan, nous passons deux jours à Katmandou. En effet, il n’est pas possible de voler directement vers l’aéroport international de Paro. De toute façon, m’a-t-on jamais vu refuser une halte dans une destination originale ?

Pour moi, la capitale du Népal résonne encore du bruit des hippies venus y chercher l’illumination ou les paradis artificiels, à moins que ça ne soit les deux, à moins que les deux se confondent…

À l’aéroport, passage par des automates qui délivrent les demandes de visas, puis par la caisse, et enfin, par les officiels de l’immigration, donc beaucoup de temps pour observer les voyageurs en faisant les diverses queues. On distingue facilement les trekkers qui vont continuer sur l’Himalaya des autres touristes. Ils sont maigres, souvent grisonnants, ont de très beaux sacs à dos ainsi que des chaussures qui ont dû coûter presque autant que le prix du vol.

Le premier choc vient du trafic en sortant de l’aéroport ! Fou, bruyant, et… à gauche. Je ne sais combien de foi j’ai cru à la collision. Le deuxième, c’est la pollution. Je pensais avoir tout vu à Pékin mais j’ai bien plus souffert à Katmandou.

Deux jours à crapahuter, guidés par Bharat, (bon guide anglophone, je tiens son @gmail à votre disposition). Si vous n’aimez pas les temples, choisissez une autre destination. Si vous n’aimez pas la foule également. En revanche, si vous acceptez d’être ébloui, étonné, bousculé, il y a de quoi remplir quelques belles journées.

Nous visitons également Patan et Bhaktapur, deux villes tellement collées à la capitale que je n’ai pas vu la transition.

Dans la partie ancienne de la ville, vous trouverez des bâtiments en brique dont les portes, les fenêtres, sont en bois finement travaillés. Des ouvrages qui demandent une dextérité à peine imaginable ainsi qu’une patience d’ange. Durbar Square montre d’incroyables temples et est en même temps un lieu d’une infinie tristesse. Le tremblement de terre de 2015 a balafré la ville et détruit des trésors d’histoire et d’architecture. Tout se reconstruit ou se restaure lentement, avec l’aide de gouvernements étrangers ou organisations internationales, mais les dégâts infligés à ces bâtiments incroyables ne font que souligner ceux qui ont décimé la population.

Dans une ville où les systèmes d’égouts et d’eau courante sont rudimentaires, on imagine aisément le coût humain d’une telle catastrophe.

En plus de la circulation folle, en voiture, deux roues, ou à pied, on croise, se promenant librement, des vaches, animaux sacrés. D’autres bêtes n’ont pas la chance d’être bénies par l’hindouisme. Nous sommes en pleines festivités et c’est le temps des sacrifices. J’ai vu une chèvre à qui on allait trancher la tête… des poulets à qui on réservait le même sort, mais j’ai détourné la tête au moment fatal. Hypocrisie que de manger de la viande sans vouloir assister à la mise à mort ?

Un peu plus loin, j’assiste au partage de la carcasse d’un buffle. Autour, des chiens des rues attendent qu’on veuille bien leur laisser quelques bas morceaux.

Dans les quartiers les plus touristiques, on est assailli de vendeurs « good price, I made this bag myself, cheap price » qui ne semblent pas se contenter d’un « no, thank you ». Un peu plus loin, une jeune fille qui apprend l’anglais demande si elle peut se joindre à nous pour entendre les explications du guide. Encore plus loin, de faux moines en habits colorés proposent de se faire prendre en photo contre monnaie sonnante et trébuchante.

Dans un bâtiment ancien vit la Kumari. C’est une toute jeune fille, elle doit avoir entre cinq et sept ans, et vit au premier étage du Kumari Bahal, petit monastère bouddhiste aux extraordinaires gravures sur bois. On peut visiter la cour intérieure et voir la fenêtre par laquelle elle vient parfois observer et bénir du regard ses visiteurs. Elle est une déesse vivante qui est soigneusement choisie entre autre pour son caractère – elle ne doit pas être craintive – et reste enfermée dans son palais jusqu’à la fin de son « temps de service » à environ douze ans, âge à laquelle elle prend sa retraite et reçoit pour le reste de ses jours une pension de l’Etat.

Lorsqu’elle nous fait grâce de son regard, il est interdit de la photographier. Vous devrez me croire sur parole lorsque je vous dit qu’elle n’avait pas l’air particulièrement de bonne humeur.

Nous pouvons assistons à quelques démonstrations dans des boutiques soigneusement choisies par le guide (j’imagine qu’il touche son pourcentage) d’utilisation de bols chantants, de création de poterie, de choix de pashminas, de peinture de mandalas.

Les trois formes de temples sont la pagode, la forme de montagne et le dôme. C’est ce dernier qui m’a le plus impressionné, il faut dire qu’entre celui qui domine la vallée de Katmandou et celui qui offre une oasis de calme, blancheur et propreté, à quelques dizaines de mètres de l’enfer de la circulation, la ville est gâtée.

Un dernier passage près d’un temple très révéré des hindous, au bord de la rivière Bagmati. Celle-ci est sacrée et va se jeter, bien plus au sud, dans le Gange. Là, les hindous brûlent le corps de leurs défunts avant d’en confier les cendres à la rivière. Autour, des centaines de singes profitent du passage des touristes ou des fidèles pour récupérer un peu de nourriture.

A chaque repas, bien que des plats occidentaux soient proposés, j’ai choisi de la nourriture locale. Je connais donc le poulet au curry, le sanglier au curry, le tofu au curry, le mouton au curry… Je suis presque soulagée de ne rester que deux jours au Népal.

Blague à part, c’est très bon !

En deux jours, j’ai en même temps l’impression de n’avoir fait que survoler l’histoire millénaire de la ville et d’avoir été épuisée par celle-ci. Katmandou est un tourbillon.