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Mère Russie – 2 au 9 août 2019

Vous connaissez ces cartes du monde à gratter… Je me souviens m’être sentie dans la peau d’une arnaqueuse le jour où j’avais gratté la Russie. Bah oui, j’avais passé trois jours à St-Petersburg. 

J’avais commencé à payer ma dette en visitant Moscou.

Et là, je m’apprête à en rembourser une bonne partie en parcourant l’Altaï. Merci Wiki, voici la définition : Altain nuruu les « chaînes de montagnes d’or ») est une chaîne de montagne d’Asiedont l’appellation comprend diverses acceptions liées à la zone située entre la Russie, la Chine (province du Xinjiang), la Mongolie et le Kazakhstan et où les grands cours d’eau Irtych et Ob prennent leur source1.

On quitte Barnaul pour Gorno-Altalsk et son musée Anoknin, on rencontre Ksenia et Maya qui nous guideront dans notre périple russe. On s’enfonce dans la vallée Karakol où poussent quantité d’herbes médicinales. Marina, une ancienne, nous parle de l’hospitalité, des rapports entre hommes et femmes, des yourtes et des traditions nomades. On est si loin de Moscou, loin de l’Europe. 

Marina parle un russe lent, soigné, en détachant les mots et les phrases et je suis très surprise d’en comprendre une partie non négligeable. 

Marina

Cette région a les pieds enfoncés dans un passé antérieur aux Soviets et se bat pour conserver des traditions ancestrales. 

En bleu et rouge – Is there life on Mars ?

Journée de contrastes avec un arrêt près d’un lac d’un bleu-vert irréel au fond changeant. « Geyser Lake » disent les locaux, mais son aspect est loin des geysers islandais. Ensuite, direction Mars ! Des montagnes, dans la vallée Kyzilchin, aux couleurs rouges orangées qui, cette-fois, trouveraient facilement leur place en Islande, du côté de Landmannalaugar. Nous parcourons quelques kilomètres à pied sous un soleil de plomb. Peut-être une manière pour nos guides de vérifier notre condition physique avant la grande marche du lendemain. 

Lac Geyser
Mars

Aktru

Nous changeons de véhicule pour un antique Zil soviétique, très haut sur roue, qui est indispensable pour nous mener à bon port : le camp de base Aktru. Deux heures pour 8 kilomètres de pistes et rivières. Je sais enfin d’où les montagnes russes prennent leur nom !!

Zil

Comme la montée vers le Nid du Tigre, mais en plus dur.

10 kilomètres… c’est la longueur de la marche pour arriver au Lac, à 2840m d’altitude. Une promenade de santé que je me disais. Oui, au début, le long de la rivière, c’était bien ça. Mais au fur et à mesure que nous prenons de l’altitude, le sentier disparait et fait place à un pierrier. Ma montre connectée à qui j’avais dit « ma grande, on va en en promenade », me demande sans cesse « tu fais une pause ? » tellement ma marche est pesante. Pas après pas, pierre après pierre, la progression se fait. Le souffle est court, la récupération lente.

Une participante a déclaré forfait avant même le départ. L’autre nous attendra au fond du dernier pierrier. 

Et à chaque pas, je me dis que ce chemin, il va falloir le redescendre sans tomber. Et je remercie mes bâtons de marche d’assurer un peu mon équilibre.

Je suis fière et heureuse d’être parvenue au sommet, mais ne piquerai pas pour autant une tête dans ce lac glacé ! Je laisse ça aux Russes et aux autres intrépides. 

Nous croisons plusieurs marcheurs, mais aussi des alpinistes pour qui le lac ne sera qu’une étape, un bivouac, vers des sommets réservés aux vrais montagnards.

L’hébergement étant sommaire, des wc « cabane au fond du jardin » et pas d’eau courante, le seul moyen de se laver après cette longue marche, est de profiter du Bania traditionnel russe, sorte de sauna. En attendant notre tour, nous fraternisons avec des locaux. Ici encore, mes maigres connaissances de la langue locale permettent de briser la glace.

Le Lac Bleu

Le lendemain, c’est bien sûr à nouveau un camion Zil qui nous ramène plus bas dans la plaine. Je vois mal comment un autre moyen de transport pourrait accéder au camp de base. Et je ne sais pas non plus quels véhicules leur succéderont le jour où ils lâcheront. Mais peut-être sont-ils immortels ? 

Vallée Chulyshman

Nous reprenons un minibus jusqu’au campement Katu Yarik. On nous fait parcourir les derniers kilomètres de descente raide à pied, la route étant très dangereuse pour les voitures, c’est un chauffeur local, à l’aide d’un 4×4 qui se charge de nos bagages.

Katu Yarik

Qui dit descente raide à pied, dit remontée raide à pied. Nous y reviendrons !

Nuit en cabanes, lessive à la rivière, toilettes au fond du jardin, et douches au bania. On s’adapterait presque à cette vie.

Bon. Est-ce maintenant que je vais cracher le morceau ? 

JE DETESTE LES CABANES AU FOND DU JARDIN. Non, ce n’est pas forcément le fait de devoir m’accroupir et viser entre deux planches… c’est l’odeur. J’ai développé une « stratégie » à base de foulard et de baume du tigre…. Mais rien qu’à m’en souvenir, j’ai encore le cœur qui se soulève.

Les « pyramides d’enseigne de l’Altai »

À ce détail près, je pourrais me faire à ce style de vie.

Nous allons nous promener du côté des champignons magiques ! C’est ce que nous promettent Julia, Ksenia et Maya. Après quelques kilomètres de grimpe dans une vallée étroite, je m’exclame « Mais c’est les pyramides d’Euseigne » !! Pour les curieux, voire ici pour la version russe ou là pour la valaisanne. . Ces drôles de pierres-champignons nous feraient presque oublier toute les plantes de marijuana qui poussent en liberté dans ces montagnes. Mais non, nous ne croisons pas de hippies locaux, tout au plus des randonneurs comme nous.

La Mongolie n’a pas le monopole du chant diphonique. C’est Oleg, un russe de l’Altai qui nous fait la démonstration de ses talents vocaux et instrumentaux dans sa yourte. Un moment hors du temps. 

Oleg

Avant de remonter à pied la dangereuse route, on nous emmène voir une spectaculaire chute d’eau. Bon, ce n’est pas les Victoria ou l’Islande, mais c’est tout de même très beau et sauvage. En chemin, je m’encouble (oui, c’est un helvétisme) et me retrouve avec un genou en sang. Rien de grave, juste une écorchure, mais qui saigne tellement que mes guides sont inquiètes.

Sérieusement, ça pique, la coupure est assez profonde, mais je sens bien qu’il n’y a rien de cassé. On désinfecte… et on repart. 

Les trois guides russes sont en plein conciliabule. Elles me regardent, toujours inquiètes. Elles parlent trop vite, je n’y comprends rien.

« Tu vas remonter avec le 4X4 et les bagages, il faut laisser ton genou se reposer ». Je crois que je n’ai jamais été regardée avec autant d’envie par mes camarades d’excursion.

Je suis à l’arrière avec les valises et Julia me fait promettre de ne pas regarder en bas « Seriously, it’s dangerous, some people panic ». Elle me dit aussi que le chauffeur va mettre la sécurité enfant pour ne pas que j’ouvre la porte dans un instant de panique. 

Je souris in petto… et obéis. J’ai profité des quelques minutes du trajet pour fermer les yeux et me remémorer des montées à Derborence, dans le Val d’Anniviers ou des routes escarpées et défoncées au Bhoutan. J’ai sans doute vu bien plus dangereux et impressionnant dans ma vie, mais une promesse est une promesse !

Cette nuit sera la dernière dans un hôtel pour plusieurs jours. Demain nous serons en Mongolie… et les tentes seront nos abris. Chargeons les batteries. Au sens figuré comme au sens propre.